Jacques SWEBACH-DESFONTAINES (1769, Metz – 1823, Paris), attribuée à
Arcueil: le pont-aqueduc Médicis et la Faisanderie
Aquarelle sur traits de plume
21,5 x 31 cm
Décrit « dessiné d’après nature » en bas à droite
Vers 1790
Provenance:
– Vente du 22 mars 1995, Drouot, Pescheteau-Badin-Godeau et Leroy, N°116 du catalogue (reproduit), titré Lavoir près d’un aqueduc. Prix de vente au marteau (hors frais): 68 000 Francs (10 367 € à taux constant)
– Collection particulière, Paris
Cette belle et lumineuse aquarelle nous offre une rare vue du pont-aqueduc d’Arcueil, quelques kilomètres au sud de Paris, puisque regardant vers l’est avec l’ouvrage d’art sur la gauche, alors que la très grande majorité des vues existantes le sont avec le pont sur la droite. Si sa luminosité et son pittoresque la rendent très désirable, son exactitude topographique en fait un véritable document historique. On y distingue précisément les habitations qui furent construites entre les arches au cours du XVIIIème siècle, alors que l’aqueduc n’était plus entretenu, ainsi que la maison dite de la Faisanderie (avec les volets bleus). Cette dernière bâtisse est un des rares vestiges du domaine d’Arcueil qui appartint au prince de Guise au début du XVIIIème siècle puis au prince de Beauveau. Le chemin à droite du pont qui passe devant la Faisanderie et monte ensuite vers la droite (sur les hauteurs de Cachan) correspond à l’actuelle rue de la Citadelle.
Ce pont-aqueduc, classé depuis 1991, fut bâti pour franchir la vallée de la Bièvre, dont on aperçoit sur l’aquarelle un bras mort, qui sert de lavoir. Construit en pierres de taille provenant des carrières d’Arcueil, il mesure 379 mètres de long, avec une hauteur maximale de près de 19 mètres, reposant pour la partie centrale sur 17 travées, dont 9 sont ouvertes en arcades (sur une longueur de 209 mètres).
C’est le seul élément visible de l’aqueduc Médicis, ou aqueduc des eaux de Rungis, dont la construction fut supervisée par Marie de Médicis entre 1613 et 1623, et dont le but était d’alimenter en eaux son palais du Luxembourg et ses fontaines. La ville de Paris désigna Jean Coing comme maître d’œuvre de l’aqueduc, mais ce furent les architectes d’Henri IV et de Marie de Médicis, Thomas Francine (d’origine florentine) et Louis Métezeau (1560-1615), qui furent chargés de créer le pont proprement dit. Vers 1870, le pont servit de base à un autre aqueduc le surplombant, celui de la Vanne, construit par Belgrand, qui acheminait de l’eau depuis la Bourgogne jusqu’à Paris, toujours visible aujourd’hui.
Après Jean-Baptiste Oudry (qui se concentra davantage sur le parc et le château), les lieux furent représentés par plusieurs artistes à la fin du XVIIIème et au début du XIXème, en gravure, à l’aquarelle ou bien en peinture, le tableau le plus célèbre étant peut-être celui du maître danois Eckersberg (1783-1853) en 1812. Jean-Victor Bertin représenta les arcades du pont avec des cadrages resserrés mais on connaît aussi de lui une Vue de la Faisanderie; dans ce dernier tableau, la Faisanderie voit son 2ème étage (bien visible sur notre aquarelle) mansardé avec un toit plus pentu, une caractéristique que l’on retrouve dans un tableau de Xavier Leprince.
Anciennement attribué à Jean-Thomas Thibault (1757-1826), notre dessin nous semble plutôt correspondre au style pittoresque et « nordique » de Swebach-Desfontaines, que l’on connaît pour ses habituelles scènes de chasse, batailles, bivouacs, convois militaires, courses hippiques…, mais qui réalisa également des vues topographiques avec des architectures (Tuileries, Porte Saint-Denis, Boulevard du Temple, etc…), qui présentent plusieurs similitudes stylistiques avec notre dessin : traitement des personnages et de leurs ombres portées, du sol avec des petits cailloux assez typiques, façon de dessiner les fenêtres.
La mention manuscrite « dessiné d’après nature » figurant en bas à droite du dessin peut par ailleurs tout à fait être comparable à l’écriture de Swebach.