Jean-Louis LANEUVILLE

Portrait de révolutionnaire aux yeux bleus


Jean-Louis LANEUVILLE (1756, Paris – 1826, Paris), attribué à
Portrait de révolutionnaire aux yeux bleus
Huile sur toile
50 x 40 cm
Circa 1794


Ce très expressif portrait d’homme à l’apparence de tribun révolutionnaire rappelant Danton s’inscrit dans le registre stylistique du peintre Jean-Louis Laneuville des années 1790.
On y retrouve clairement une influence davidienne, s’expliquant par la fréquentation par l’artiste pendant quelque temps de l’atelier du maître du néo-classicisme (vraisemblablement avant 1792, même si aucune source ne donne une date exacte). Le fonds neutre et une certaine forme de réalisme ou d’austère sobriété juste relevée par quelques touches de couleurs vives en sont les principales caractéristiques.
Certains éléments sont ici plus particulièrement typiques de la manière de Laneuville: le traitement des cheveux coiffés au naturel, l’intensité du regard (ici presque hypnotisant) fixant le spectateur avec des yeux en forme de billes, les pommettes assez proéminentes et au rosé accentué (que l’on retrouve par exemple dans le portrait de Claude Boyer de 1794, ou encore davantage dans le portrait du conventionnel Michaud de 1792, conservé au musée de Pontarlier), et la touche lisse. La simplicité de la redingote marron contraste avec le rouge vif du gilet et le blanc au liseré rose de la cravate en mousseline au petit noeud.
Le cadrage resserré, qui accentue la présence du modèle, est toutefois assez inhabituel chez l’artiste, et pourrait laisser penser que notre portrait a été réduit dans ses dimensions.
L’identité du modèle n’a pu à ce jour être découverte; même si Laneuville représenta dans ces années 1790 essentiellement des politiciens et acteurs de la Révolution (dont il partageait les idées jacobines d’origine) appartenant à la bourgeoisie, notre homme pourrait tout aussi bien être un artiste ami, un médecin ou un citoyen lambda.

Laneuville était le fils naturel d’un parlementaire qui avait notamment joué un rôle important dans le jugement de l’affaire du collier de la Reine. Talentueux peintre de portraits exclusivement, il commença par exposer au Salon de la Jeunesse dans les années 1780, puis au « vrai » Salon à partir de 1791, et ceci jusqu’en 1817.
Tout en réalisant des commandes privées et officielles sous le 1er Empire, il développa fortement pendant cette période une lucrative activité d’expert en vente publique (il apparaît désigné comme tel dans le Journal des Arts dès 1801) et de marchand de tableaux à partir de 1809, en cohérence avec sa personnalité très pragmatique; son fils était d’ailleurs commissaire-priseur.
Figurant parmi les meilleurs élèves de Jacques-Louis David (au point que certaines oeuvres furent parfois confondues), Laneuville fut un des portraitistes les plus recherchés des années 1790, et une trentaine de ses tableaux sont aujourd’hui identifiés et localisés avec certitude. En l’état actuel des connaissances, son corpus comporte une centaine d’oeuvres, mais sa production réelle est certainement beaucoup plus importante, sachant qu’il exposa plus de 40 tableaux rien qu’au Salon. Sans que cela soit encore avéré, il est très possible qu’il ait par ailleurs dirigé un petit atelier d’élèves.

Musées: Versailles, Carnavalet, Troyes, Joslyn Art Museum Nebraska, Indiana Art Museum…