Gustave COLIN

Le donjon du château de Saintines (Oise)


Gustave COLIN (1828, Arras – 1910, Saint-Jean-de-Luz)
Le donjon du château de Saintines (Oise)
Huile sur panneau
50,5 x 32 cm
Signé et dédicacé « A Madame Reyre, hommage respectueux » en bas à droite
Vers 1895


« Nordiste » originaire du Pas-de-Calais, élève de Ary Scheffer, Thomas Couture et Corot, Gustave Colin s’installa au pays basque à Ciboure en 1858. Il y rencontra sa femme et resta définitivement dans la région. Peintre de paysages parfois apparenté au mouvement impressionniste, il s’attacha aussi à la représentation de scènes traditionnelles locales, ou de sports comme la corrida et la pelote.

Le château de Saintines, situé au sud-ouest de la forêt de Compiègne, fut bâti au début du XIVème siècle par la famille de Cuignières, sur les bases d’un édifice construit au XIème siècle; le donjon datait lui du début du XVIème siècle. Au XIXème siècle il était la propriété du marquis de Forbin-Janson, puis resta quasiment abandonné jusqu’au rachat par la famille Reyre à la fin du siècle.

Voici un extrait du récit d’une excursion effectuée par une vingtaine de membres de la Société Historique de Compiègne le 19 juillet 1894, et qui passait notamment par Saintines, Verberie et Rhuis:
« Monsieur Reyre veut bien nous faire les honneurs de la propriété qu’il a achetée récemment… il a su donner un air de gaieté et une nouvelle vie au vieil édifice. Les fossés curés avec soin nous montrent une eau claire et courante; le vieux château, restauré déjà en partie, a complètement changé d’aspect, et c’est en suivant des allées sablées, au milieu des massifs de fleurs, que nous arrivons au donjon, dégagé des broussailles qui l’entouraient, et déjà garni d’une partie des tentures et des meubles qui doivent, tout en lui conservant son caractère, le rendre habitable… nous tenons à remercier Monsieur et Madame Reyre de leur hospitalité » .

Les Reyre occupaient déjà le château en 1892; à cette date, c’est en en effet à Saintines que naît un de leurs enfants et que décède la mère de Monsieur Reyre.
Antoine-Patrice Reyre (1849, Guayaquil – 1940, Chatelguyon) était un riche négociant dont le père, pharmacien originaire de Marseille, avait fait carrière en Equateur et s’y était marié. Cultivé, et quelque peu artiste lui-même, il redonna vie au château de Saintines en le décorant de meubles précieux et d’importants tableaux anciens. Il avait épousé Marie, Rosa, « Pépita » Noséda (1865 – 1963), la fille d’un ingénieur français et d’une espagnole. Le domicile parisien de Monsieur et Madame Reyre se situait au 34, rue de Châteaudun.

Antoine Reyre était ami avec Gustave Colin, et possédait plusieurs de ses tableaux. L’artiste eut même l’occasion de donner quelques leçons de peinture à la fille aînée des Reyre, Valentine (1889-1943), qui devint une figure importante de l’art religieux au cours de la première moitié du XXème siècle, et dont le musée de Senlis conserve plusieurs oeuvres.
Avec l’acquisition du château de Saintines, Antoine Reyre s’impliqua dans la vie culturelle locale et devint membre du comité archéologique de Senlis en 1895.

Gustave Colin, quittant provisoirement son pays basque d’adoption, vint peindre plusieurs tableaux dans l’Oise en 1895/1896, notamment à Orrouy où il passa quelque temps chez son ami et mécène le comte Doria peu de temps avant le décès de celui-ci.
Notre tableau (peint sans préparation, il laisse par endroits apparaître les réserves du panneau), dans lequel il exprime particulièrement ses qualités de coloriste, est un autre témoignage des relations amicales qu’il pouvait avoir avec ses collectionneurs.

L’iconographie artistique du château de Saintines semble peu fournie, en dehors d’une estampe de 1855, puis d’un tableau peint par Maurice Utrillo en 1925.