Dominique MAHLKNECHT

Portrait de René Descartes en pied


Dominique (Johann Dominik) MAHLKNECHT (1793, Kastelruth – 1876, Paris)
Portrait de René Descartes en pied
Terre cuite à patine brune
h: 40 cm
Signée et datée sur le socle
1844


Natif du Tyrol Sud (aujourd’hui nord de l’Italie), Mahlknecht est parfois décrit à tort comme un élève de Canova, mais il semble que c’est lui-même qui prétendait avoir reçu des leçons du sculpteur néo-classique italien. Après de courts séjours à Lyon puis au Mans, le jeune artiste encore autrichien s’établit en 1812 à Nantes, où il travaille dans l’atelier de Joseph Debay (1779-1863); la ville le nomme sculpteur municipal en 1821. C’est à l’occasion de l’inauguration de sa monumentale sculpture de Louis XVI, en septembre 1823, que Mahlknecht rencontre la duchesse d’Angoulême, dont il sera dès lors un familier. Artiste légitimiste, plusieurs de ses sculptures représentent ainsi des Bourbons (Louis XVI, le duc de Bordeaux), ou des figures vendéennes (Charette, Cathelineau); il est désigné le 4 septembre 1826 « Sculpteur de son Altesse Royale », et l’Etat lui octroie un atelier au 9, quai d’Orsay à Paris, où il était arrivé en 1825.
Sous la Monarchie de Juillet, Mahlknecht conserve cependant les faveurs du nouveau pouvoir royal, qui lui commandera entre autres de nombreuses oeuvres à thématique religieuse pour décorer des églises (les Invalides, la Madeleine, Saint-Germain l’Auxerrois, l’église Saint-Louis de Versailles, par exemples); dès 1831 il crée d’ailleurs un buste à l’effigie de Louis-Philippe, et reçoit au Salon de la même année une médaille pour sa Vénus en marbre, affectée à Orléans. Autrichien devenu nantais, Mahlknecht fut naturalisé français en 1848 (ou peut-être 1846), et fut fait chevalier de la Légion d’Honneur.

A côté de sa production religieuse et parfois mythologique (Adonis, Ulysse, Terpsichore…), Mahlknecht est aussi le sculpteur des gloires françaises, sujets qui correspondent bien à cette époque où Louis-Philippe souhaite réhabiliter l’Histoire de France; il réalisera par exemple des effigies de Du Guesclin, Saint Vincent de Paul, Molière, Corneille, Duguay-Trouin, Parmentier. Plus particulièrement en 1844, année de notre statuette, il crée les statues de Murat, du Maréchal Bessières et de Dumont d’Urville.
Notre représentation de René Descartes correspond selon toute vraisemblance à une esquisse préparatoire (commande ou bien proposition « spontanée » de Mahlknecht) pour un projet qui n’a pas été réalisé; le cas était fréquent pour les sculpteurs, et Mahlknecht en avait fait les frais en 1827 pour une commande de la ville de Rennes d’une statue de Louis XVI, finalement abandonnée.

Les effigies sculptées de Descartes étaient rares jusqu’alors, mis à part l’oeuvre de Pajou en 1777, et un buste en fonte de fer présenté au Salon de Douai 1828 par le fondeur Lepet-Desuède. Emilien Nieuwerkerke (1811-1892) créera en 1846 une statue en pied pour la ville de Tours; comme dans la version de Mahlknecht, dont elle est finalement assez proche, on y trouve un amoncellement de livres aux pieds du philosophe et mathématicien, mais avec une sphère à la place du compas.
Guillaume Bonnet (1820-1873) présentera un buste en plâtre au Salon de 1849, commandé par le Ministère de l’intérieur. Chose intéressante, le sculpteur nantais Jean-Baptiste Barré (1804-1877), élève de Mahlknecht, proposera au Salon de 1866 une statue en plâtre (en pied) de Descartes, qui était conservée au musée de Rennes, mais aujourd’hui perdue; peut-être cette oeuvre s’inspirait-elle de la statuette de son maître ?