Jules COIGNET, attribué à

Concours de chant en Arcadie


Jules COIGNET (1798, Paris – 1860, Paris), attribué à
Concours de chant en Arcadie
Huile sur toile
32 x 41 cm
Vers 1820


Ce beau tableau, à la touche lisse et au rendu porcelainé, est un mélange de néo-classicisme arcadien et idéalisé, avec une nature où les éléments végétaux sont traités de manière bien réelle, presque botanique.
L’oeuvre a été précédemment donnée à Achille-Etna Michallon, ce qui relevait d’une certaine logique: l’appétence pour les tons de verts, plutôt foncés mais cependant variés et subtils, le goût pour les représentations d’arbres, avec notamment un travail remarquable sur l’écorce du tronc (point vedette de la composition), le respect de la ligne académique du paysage néo-classique recomposé avec toutefois une touche de naturalisme voire de romantisme, la belle qualité d’exécution, tout cela évoque effectivement au premier abord le vainqueur du grand prix de Rome de paysage historique de 1817, surnommé le « petit Poussin » par son premier mécène le prince Youssoupoff.

Il nous semble toutefois plus juste et pertinent de considérer cette peinture comme une oeuvre de jeunesse de Jules Coignet, réalisée au moment où celui-ci fréquente l’atelier de Jean-Victor Bertin (qui lui-même forma Michallon), entre 1818/1819 et 1821 (année de sa participation au grand prix de Rome de paysage historique).
Coignet produit alors des paysages dits historiques ou héroïques, dans la lignée de ceux de Valenciennes ou de son maître Bertin; mais rapidement, à l’occasion d’un premier voyage en Italie et à l’instar de son presque contemporain Jean-Charles Remond, il s’émancipe de ce genre pour peindre des paysages réels, en étant particulièrement sensible à la topographie et aux effets de lumière, et avec une facture moins académique. Il effectuera ensuite une importante carrière de paysagiste, exposant à presque chaque Salon à partir de 1824, et voyageant un peu partout en France, en Europe et même en Orient.
Tout comme Michallon, Coignet affectionne particulièrement les études et les représentations d’arbres; ici, la facture du tronc (avec beaucoup de blanc et la présence de mousse verte) correspond bien à sa manière; de même pour les feuillages (qu’on peut retrouver à l’identique jusque dans des tableaux des années 1830), ou encore la petite figure animale.
L’influence de Jean-Victor Bertin s’avère forte lorsque l’on compare notre toile avec le tableau que Bertin expose au Salon de 1817 (et aujourd’hui conservé au musée de Rennes), les deux oeuvres présentant plusieurs points communs: composition assez « fermée », importante présence végétale, traitement presque identique du tronc et de l’écorce de l’arbre de droite (dans le tableau de Bertin), facture similaire des feuillages à hauteur intermédiaire.

Il existe plusieurs versions connues de cette composition, de formats similaires et avec des variations dans les figures (présence ou non du juge, absence ou non d’un ou plusieurs animaux) ou les branchages, ce qui laisse supposer qu’elle dut bénéficier d’un certain succès à l’époque, voire qu’elle ait fait l’objet d’une gravure.
Quant au sujet, il s’inspire probablement des Idylles de Théocrite ou des Bucoliques de Virgile, dans lesquelles de jeunes pâtres d’Arcadie (chevriers, bergers ou bouviers) s’affrontent dans des concours de chant, avec la présence d’un juge désignant le vainqueur; les bergers ici représentés pourraient ainsi être Daphnis, Ménalque ou Damétas, et le juge Palémon ou Mélibée.