Jean-Baptiste CLAUDOT

Assemblée de personnages près de ruines antiques et d’un rivage italien


Jean-Baptiste CLAUDOT (1733, Badonviller – 1805, Nancy)
Assemblée de personnages près de ruines antiques et d’un rivage italien
Huile sur toile
65 x 81 cm
Vers 1775


Fils d’un avocat à la Cour de Lorraine qui meure 3 mois après sa naissance, Jean-Baptiste (mais Charles fut son véritable prénom de baptême) Claudot manifeste très tôt un goût et des facilités pour la peinture.
Il commence par peindre, dès l’âge de 12 ans, des décors d’église (à Blâmont et Lunéville), puis de théâtre, en compagnie de son maître Jean Girardet (1709 – 1778). Il apprend également l’art de la perspective et des « vedute » auprès d’André Joly (1706 – après 1781).
Après son mariage en 1759, il s’installe définitivement à Nancy où il connaît un réel succès auprès de la ville, du gouvernement, et de riches clients privés. La situation politique et économique de la Lorraine devenant instable, il décide en 1766, malgré un carnet de commandes bien rempli, d’aller à Paris quelque temps en compagnie de sa femme; lors de ce séjour qui aurait duré presque 3 ans, il rencontre Joseph Vernet, qui devient son ami et lui prodigue un complément de formation, notamment dans la façon de produire vite et bien des grands effets décoratifs. Claudot exécute alors des paysages et des marines italianisantes proches de celles de Vernet, mais aux décors majoritairement imaginaires car il n’a jamais mis (et ne mettra jamais) les pieds en Italie, contrairement à son maître.

Durant toute sa carrière, Claudot peint énormément de tableaux pour les demeures de sa région. Certains, surtout dans les années 1790, étaient exécutés très rapidement, avec peu de soin, possiblement par des petites mains de son atelier, et vendus pour peu de prix. En dehors de cette production « alimentaire », il sut la plupart du temps faire preuve de grande finesse dans ses plus beaux tableaux, tel le nôtre. Celui-ci, contrairement à d’autres de ses peintures, se rapproche d’ailleurs davantage de l’esprit pittoresque des oeuvres de Vernet ou Lacroix de Marseille, que de celui des pastorales rustiques de Boucher ou encore Nicolas Julliard.
Concernant son style, le fait de ne pas avoir observé de visu les ruines et sites italiens ou même la mer, et de ne les connaître que par les représentations forcément imparfaites ou subjectives d’autres artistes, donne parfois à ses tableaux un caractère italianisant aimablement factice, et dans le même temps sublime sa capacité à imaginer d’infinies variantes du paysage italien, « avec une pointe de style héroïque mélangé d’idylle pastorale »
comme l’écrit si bien le peintre et historien Gaston Save dans un article de « La Lorraine artiste » de 1888. On considère que ses compositions sont pleines d’imagination poétique, de vie et de mouvement, représentant une certaine forme d’existence insouciante: ainsi on ne trouve dans son oeuvre quasiment pas de ciels tourmentés, de scènes de tempête, orage ou naufrage.
D’un point de vue technique, les tableaux de Claudot sont assez spontanés: ils sont peints du « premier jet », bien empâtés, avec un coloris frais et brillant, sans glacis, frottis ou repeints, ce qui leur garantit une bonne conservation. Il dispose de nombreux croquis (souvent exécutés à la sanguine) d’études de figures humaines ou animales et de végétaux, qu’il utilise de façon répétée pour ses compositions.
Claudot suivait en cela les préceptes de Vernet; en revanche, par rapport à son maître et ami, il a sensiblement moins le sens du détail et de la finition, ceci s’expliquant à la fois par des facilités naturelles de dessin assez exceptionnelles et par une certaine déformation professionnelle du décorateur qui vise avant tout à l’effet.

Particulièrement vers la fin de sa carrière, Claudot affirme son ancrage local en peignant des vues de villes lorraines (Nancy, Lunéville, Metz, Pont-à-Mousson…) et des « portraits » de châteaux de la région.
Même s’il pratiqua tous les genres picturaux (portraits, scènes religieuses, histoire, natures mortes, miniatures pour tabatières, décors de théâtre et de salles des fêtes, scènes grivoises…), c’est dans le paysage « ruiniste » qu’il s’exprima le plus et le mieux, lui qui dès son plus jeune âge avait été un admirateur de son illustre compatriote Claude Gelée.
D’une personnalité vertueuse, charitable, pieuse et pleine de bonté, humble et sérieuse, mais d’un tempérament cependant vif et alerte, Claudot était apprécié de tous. Parmi ses élèves figurèrent les futurs miniaturistes Jean-Baptiste Isabey, Jean-Baptiste Augustin, Jean-Antoine Laurent. Quant à ses fils aînés issus de son premier mariage, Dominique-Charles (né en 1769) devint conservateur du musée de Nancy, et Hubert-François (né à Paris en 1767, filleul de Joseph Vernet) fut professeur de dessin.

Peintre paysagiste le plus important en Lorraine dans la seconde moitié du XVIIIème siècle, Claudot fit l’objet d’une exposition au musée Lorrain de Nancy, du 25 juin au 16 octobre 2006.
Très attaché à sa région, il avait notamment refusé les offres de plusieurs souverains d’Europe qui l’avaient appelé auprès d’eux. Son oeuvre, adepte d’une nature vive, légère et brillante, incarne agréablement la période des « Lumières ».