Florent-Constant BOURGEOIS

Le château de Versailles et la pièce d’eau des Suisses vers 1807


Florent-Fidèle-Constant BOURGEOIS (1767, Guiscard – 1841, Passy)
Le château de Versailles et la pièce d’eau des Suisses vers 1807
Encre et lavis
13,3 x 20,8 cm


Constant Bourgeois semble avoir été élève dans l’atelier de Jacques-Louis David, où il se spécialisa dans le paysage. Il est très souvent confondu avec un autre Bourgeois, Bourgeois du Castelet, dont on sait peu de choses, sauf qu’il fut d’abord un militaire puis un peintre paysagiste qui exposa à partir de 1822 au Salon.
Exposant ses oeuvres à tous les Salons de 1791 à 1830, c’est avant tout un extraordinaire dessinateur; Paul Marmottan, dans son « Ecole française de peinture, 1789-1830 », évoque ainsi sa « grande pureté de style et l’exécution brillante de ses dessins, la plupart très remarquables, notamment ceux au lavis« . Très recherché et apprécié de son vivant, Bourgeois reçut de nombreux prix et récompenses artistiques, un logement au Louvre, et la Légion d’honneur en 1827.

Après la tourmente révolutionnaire, le domaine de Versailles devient un lieu de promenade très fréquenté, à tel point qu’en 1804 un guide est publié à l’intention des visiteurs. A la même époque, l’ancien château royal porte l’appellation de Palais Impérial, et reçoit la visite de Napoléon 1er en mars 1805; celui-ci s’intéresse au lieu et demande à ses architectes divers projets de transformations ou réhabilitations, qui concernent essentiellement l’intérieur du château et le domaine de Trianon. Jacques Gondouin (1737-1818), Guillaume Trepsat (1743-1813) et surtout Pierre François Léonard Fontaine (1762-1853) s’attelèrent ainsi à la tâche, entre rivalités et jalousies.
Mais si Trianon fit l’objet de réels travaux et aménagements, et fut occupé par l’Empereur et sa famille, le château proprement dit, en raison des indécisions de Napoléon, des conflits incessants et du manque de finances, ne connut aucune réalisation.

Bien loin des préoccupations politiques de Napoléon (celui-ci eut même dans l’idée de placer dans les jardins des reproductions réduites des principaux monuments des villes étrangères qu’il avait conquises!), notre dessin présente un Versailles bucolique, apaisé, intact, quelque peu hors du temps et empreint de la poésie ruiniste des oeuvres du XVIIIème siècle d’Hubert Robert par exemple.
La pièce d’eau des Suisses est un étang artificiel (environ 13 hectares de superficie) qui doit son nom aux gardes suisses qui en assurèrent la réalisation vers 1680; son rôle originel était de drainer le potager du Roi situé juste à côté, mais elle constituait aussi un élément de perspective dans le prolongement des parterres du Midi et de l’Orangerie; au même titre que le Grand Canal, elle servait aussi à l’occasion de fêtes nautiques. Sur la droite, renforçant le rôle repoussoir de l’arbre, on distingue une partie de la statue équestre du Bernin représentant Louis XIV sous les traits de Marcus Curtius, et qui survécut à la Révolution; la version originale est conservée à l’intérieur de l’Orangerie depuis les années 1980.

Comme toujours chez Bourgeois, le dessin allie précision topographique et qualités artistiques.