Auguste LELOIR

Jeanne d’Arc dans sa prison, insultée par des soldats

Tableau de Chlebowski, Salon de 1864

Auguste Jean Baptiste LELOIR (1809, Paris – 1892, Paris)
Jeanne d’Arc dans sa prison, insultée par des soldats
Plume et encre de Chine
12 x 15 cm
Signée et titrée en bas
1865
Oeuvre en rapport: tableau exposé au Salon de 1865 sous le N° 1316.
Bibliographie: dessin reproduit à l’identique dans « L’autographe au Salon » de 1865, p. 27


Elève du maître néo-classique François Picot, Auguste Leloir est un peintre d’histoire, de sujets religieux et mythologiques, et de portraits, qui exposa plus de 60 oeuvres au Salon, entre 1835 à 1879. Sa reconnaissance officielle se traduisit par de nombreuses médailles au Salon et l’obtention de la légion d’honneur en 1870. En 1865, il est domicilié au 38, rue de Fleurus à Paris.
Ami avec le père de Guy de Maupassant, et marié avec Héloïse, une des filles du peintre Alexandre Colin, il eut deux fils également artistes: le peintre et surtout illustrateur Maurice Leloir (1853-1940), ainsi que Louis-Alexandre Leloir (1843-1884), peintre d’histoire et de genre.

La composition montre Jeanne, enfermée dans sa cellule du donjon du château de Bouvreuil à Rouen, avec les deux soudards qui la gardent; la physionomie de Jeanne, tout comme celles des deux hommes, laisse à penser, comme l’histoire le suppose, qu’elle ne sera pas seulement insultée, mais aussi probablement violée.
Auguste Leloir traita de nouveau le thème de Jeanne d’Arc au Salon de 1869, avec Jeanne d’Arc enfant, exposé sous le N°1475.

Plus de 60 tableaux exposés au Salon entre 1800 et 1870 illustrent la vie de Jeanne d’Arc, sans compter les oeuvres sculptées.
Quasiment absentes lors des Salons du 1er Empire, les compositions johanniques se multiplient à partir de la Restauration, avec une apogée dans les années 1825-1840 (environ 25 tableaux): cette période correspond à la maturité finissante du style « troubadour » (avec son goût pour le passé national, surtout médiéval, et parfois traité dans un style anecdotique ou sentimental), couplée au développement rapide de la peinture d’histoire traitée sous un angle à la fois romantique et plus « vériste », presque scientifique.
L’engouement pour Jeanne diminue ensuite fortement, avec seulement 3 tableaux entre 1845 et 1860, mais comprenant le fameux tableau d’Ingres en 1855, sorte d’Ovni stylistique à cette époque.
Puis le phénomène reprend à partir de 1861, avec 20 tableaux présentés jusqu’en 1870, date à partir de laquelle il y aura une véritable explosion; le peintre Isidore Patrois réalise même une sorte de « cycle » sur Jeanne d’Arc prisonnière, avec trois tableaux:
Jeanne d’Arc après la journée de Compiègne, 1864, conservé au musée d’Orléans, Jeanne d’Arc insultée dans sa prison, 1866, (qui reprend donc un an après la même thématique que le tableau de Leloir), conservé au musée d’Angers, Jeanne d’Arc allant au supplice, 1867, conservé au musée de Rouen.

Un des intérêts de notre dessin est qu’il est aujourd’hui la seule trace originale connue du tableau du Salon de 1865, ou bien disparu, ou bien conservé dans une collection particulière non localisée.
Il témoigne aussi de l’inspiration entre les artistes: la posture de Jeanne est en effet très proche de celle du tableau de Stanislas Chlebowski, Jeanne d’Arc prisonnière des anglais, exposé au Salon de 1864 et conservé au musée de Bar-le-Duc, que Leloir avait forcément pu observer à cette occasion.