Achille BENOUVILLE

Le Teverone à Lunghezza

Tableau du Louvre, 1848
Tableau du musée de Houston, 1864
Bords de l'Aumance (Allier), Salon de 1886
Aquarelle d'Enrico Coleman, 1890

Achille BENOUVILLE (1815, Paris – 1891, Paris)
Le Teverone à Lunghezza
Huile sur toile
60 x 100 cm
Signée en bas à gauche
Plusieurs étiquettes d’exposition au dos du cadre d’origine
Exposition: Salon de Paris de 1888, sous le numéro 194, titré Le Teverone à Lunghezza ; campagne de Rome
Bibliographie: Marie-Madeleine Aubrun, catalogue raisonné de l’oeuvre, Paris 1986, numéro 196, reproduit page 135


Achille Bénouville est probablement le principal représentant de ce que l’on pourrait définir comme la troisième (et pour ainsi dire dernière) génération des paysagistes néo-classiques et/ou historiques, nés dans les années 1810/1820, comme Félix Lanoue, Paul Flandrin, Eugène Ferdinand Buttura ou encore Alfred de Curzon. Elève de Picot puis de Léon Cogniet, il se spécialise rapidement vers la peinture de paysage, en commençant par des vues du bassin parisien qu’il expose au Salon dès 1834. Il effectue trois courts séjours en Italie, en 1838, 1840 et 1843, le dernier lui permettant de partager l’atelier et l’amitié de Corot à Rome.
Après avoir remporté le prix du paysage historique en 1845 (la même année, son frère Léon est lauréat du prix de Rome de peinture), il retourne en Italie pour passer trois ans à la villa Médicis, puis s’établir dans le pays jusqu’au décès de sa femme en 1870, événement qui le fait revenir en France.

Le Teverone, également appelé Aniene (ou encore Anio), est un affluent du Tibre d’environ 100 km de long. Arrosant Subiaco, puis Vicovaro, son cours se calme après avoir traversé Tivoli. Lunghezza se situe à mi-chemin entre ce dernier village et Rome. C’est aujourd’hui une localité située dans la très grande banlieue romaine, dont le château, édifié au moyen-âge, servit de quartier général pour l’armée allemande en Italie lors de la seconde guerre mondiale.
Le site fut rarement peint par les artistes, et on n’en trouve d’ailleurs à ce jour pas trace chez les deux premières générations de paysagistes dit néo-classiques (Valenciennes, Dunouy, Chauvin, Michallon, Remond, Giroux, Corot … etc). En revanche Alfred de Curzon représenta Lunghezza (une de ses destinations privilégiées lorsqu’il était en Italie; il décrit le lieu comme « superbe mais d’un air détestable en été; c’est au mois de novembre que nous devons y demeurer » ) avec un tableau au Salon de 1887 (numéro 2757 du livret), possiblement le même qu’il avait présenté au Salon de 1884 (numéro 634). On connaît aussi, de la même époque (1890) une jolie aquarelle (25,5 x 53 cm) du paysagiste italien Enrico Coleman (1846 – 1911), avec le même point de vue que dans notre tableau, mais pris de la rive opposée du Teverone. Citons enfin le tableau de Louis Français, Bords du Teverone, effet du soir, exposé au Salon de 1850.
Quant à Bénouville, il avait déjà représenté cette région, notamment dans son tableau du Salon de 1848 (numéro 275 du livret), titré Lungezza (environs de Rome), vraisemblablement l’oeuvre du musée du Louvre (Inv 20588), 1,42 x 2,01 m, puis au Salon de 1864 avec un tableau titré Lunghezza (numéro 139 du livret), certainement l’oeuvre aujourd’hui conservée au musée de Houston (Texas), 1,70 x 2,35 m. Le tableau de 1864 semble plus précisément représenter la via Nomentana, et Bénouville en exposa une vue très proche à l’occasion du Salon de 1884 (Via Nomentana; campagne de Rome, numéro 178 du livret); le tableau de 1848 inclut quant à lui une représentation du château de Lunghezza.
Notre tableau est reproduit dans le catalogue illustré du Salon de Paris de 1888, page 174, mais avec un titre erroné, Les bords de l’Oise, près Stors (Seine et Oise), correspondant au second tableau (non reproduit dans le catalogue) exposé par l’artiste à ce salon.

D’une très belle exécution, notre peinture dégage aussi une grande élégance, avec les collines bleues de l’horizon, les branchages et les feuilles de l’arbre penché sur la rivière. Pas de figures humaines, mais des « bufflones » blancs, typiques de la campagne romaine, sont toujours là pour animer ce paysage à la vitalité encore sauvage.
Le style est caractéristique de la fin de carrière de Bénouville, plus naturaliste que néo-classique, même si la restitution de l’intense lumière italienne est restée inchangée chez l’artiste; l’évolution, bien visible lorsque l’on met en rapport notre oeuvre avec les tableaux de 1848 et de 1864, est comparable à celle de Corot, allant du synthétisme néo-classique à la sensibilité « barbizonienne » . On peut ainsi rapprocher, aussi bien en terme de composition que de facture, notre tableau de l’Aumance, sous Chateloy; Hérisson (Allier), 0,89 x 1,32 m, exposé au Salon de Paris de 1886 (numéro 174) puis à celui de Toulouse de 1890 (Bords de l’Aumance, numéro 30 du livret), et vendu aux enchères 13 000 €, prix marteau, à Drouot (étude Oger-Semont) le 19/05/2008.

Musées: Louvre, Orsay, Met de New-York, Dallas, Houston, Cleveland, Baltimore, Boston, Nancy, Rennes …