Hippolyte BELLANGE

Le passage du bac


Hippolyte BELLANGE (1800, Paris – 1866, Paris)
Le passage du bac
Aquarelle gouachée
19,5 x 24,5 cm
Signée et datée en bas à gauche
1830
Provenance:
– Collection Jean-Nicolas Moyon
– Probablement sa vente les 16/17/18/19/20 janvier 1838, « Belle et nombreuse collection de tableaux modernes et de quelques beaux tableaux anciens, après cessation de commerce de Monsieur Moyon » , Hôtel des Ventes mobilières, Paris, 2, place de la Bourse, Salle 1, Commissaire-Priseur Pierret, Expert Schroth. N°37 du catalogue, sous le titre Le retour au village


Notre aquarelle est répertoriée (avec le titre Passage du bac) par Jules Adeline sous le N°22 dans son catalogue des tableaux et dessins de Bellangé publié en 1880; Adeline la date par erreur en 1831, et indique qu’elle appartient à M. Moyon. Il s’agit presque à coup sûr de Jean-Nicolas Moyon, né à Saint-Germain en Laye en 1798, fils d’un marchand fripier, qui était à l’origine un éditeur d’estampes, mais qui devint également marchand de dessins et de tableaux, installé au 5 rue de l’Université à Paris. Son fonds était constitué d’oeuvres des meilleurs artistes « modernes » de l’époque, comme Bellangé, Bertin, Boisselier, Bidauld, Bouton, Coignet, Dubufe, Fleury, Géricault, Girodet, Gudin, Lapito, Leprince, Pingret, Rémond, Roehn, Renoux … En particulier, la vente de son fonds comprenait 8 oeuvres de Bellangé (lots 33 à 40 du catalogue), notre aquarelle étant ainsi décrite : « un grenadier de la vieille garde traverse la rivière dans un batelet, une femme, assise derrière lui, réfléchit, tandis que lui regarde avec attention l’autre rive. Ce joli tableau est bien composé, son exéution est des plus jolies, et la couleur en est fine et transparente » .
Bellangé réalise ici une scène de genre campagnarde, dans l’esprit de celles de Xavier Leprince ou surtout de Francisque Grenier de Saint-Martin. Nous sommes en Normandie, ainsi que laissent deviner la tenue du jeune passeur et la coiffe de la paysanne. Le militaire fumant sa pipe est un brigadier du 6ème Régiment de cuirassiers (et non un grenadier comme l’indique la notice de la vente de 1838), dit de Condé. Plus précisément, la scène pourrait se situer sur la Seine, juste, en amont de Rouen.

Fils d’un célèbre ébéniste de l’Empire, Hippolyte Bellangé effectue de courtes études au lycée Bonaparte. Il entre à 16 ans dans l’atelier du baron Gros, où il rencontre notamment Nicolas Charlet, avec lequel il restera ami sa vie durant. Tout comme Charlet et son autre ami Raffet, il est ébloui et fasciné par le prestige de Napoléon. Il expose pour la première fois au Salon en 1822, et y reçoit une médaille de deuxième classe en 1824. En 1834, c’est la consécration avec l’obtention de la Légion d’Honneur pour son tableau Le retour de l’île d’Elbe. En dehors de quelques grandes compositions de batailles (dont certaines sont conservées à Versailles), c‘est dans les petits formats et les tableaux de chevalet ainsi que dans les dessins et aquarelles qu’il excelle véritablement, en y faisant preuve d’une habileté extrême. Les 17 années qu’il passe à Rouen (1837-1854), où il est conservateur du musée et a son atelier rue des Champ-des-oiseaux, l’éloignent quelque peu des succès parisiens. Travailleur acharné et artiste fécond, il peint jusqu’au jour de sa mort. Son fils Eugène (1837-1895) fut lui aussi un peintre militaire.